Polieri, méta-scénographe et la conquête technologique

Fondateur  avec Le Corbusier des « festival de l'art d'Avant-Garde » à Marseille en 1956, puis à Nantes en 1958 et Paris en 1960, Jacques Polieri  intègre également dans ses mises en scènes des œuvres de Arp, Brancusi, Klee, Mirò, Pevsner... Il met également  en scène des textes de Tardieu, Butor, de Mallarmé (« Un coup de dés jamais n'abolira le hasard » et « Le Livre ») et « Sonorité Jaune » de Kandinsky en 1976.


Par delà le Spectacle,

Il propose une forme unique pour la vision de chacun des spectateurs. Il systématise la complexité de ses compositions et ouvre la voie à un autre type de représentation. Il met en place dès lors ses tracés au sol et transpose la scène frontale à l'italienne en un espace tridimensionnel. Empreintes des mathématiques, ses spectacles sont définis par des systèmes de notation et des structures originales.

Dès 1964, il bouscule le concept même de la représentation dans son ballet  « Gamme de 7 » : des caméras et des vidéoprojecteurs donnent aux spectateurs des points de vue différenciés. Puis en 1968, la construction de salles mobiles à Paris et à Grenoble est l'aboutissement de sa vision de l'espace de représentation, opposée à celle du théâtre  dit « à l'italienne ».

C'est en 1967, qu'il conçoit sous forme de maquette, ce qui deviendra en 1970 le « théâtre du mouvement total » pour l'Exposition Universelle d'Osaka, au Japon.
Les spectateurs prennent place dans une sphère sur des plates-formes mobiles géantes qui les déplacent dans les trois dimensions. Ils se trouvent alors immergés dans de multiples projections sonores et visuelles. Ce « théâtre » met un point final alors à la scénographie mécanique et clôture ainsi un mode esthétique.

Visionnaire, Polieri écrit dés 1963 dans son texte « Scénographie de l'image électronique » : « Des actions se déroulant à de très grandes distances les unes des autres pourront également être envisagées grâce aux télé-techniques.»


Scénographie ou conquête technologique

Jacques Polieri n'aura alors de cesse d'utiliser de nouvelles technologies avant qu'elles ne se démocratisent.

Depuis  la  « Rue des loisirs » pour les Jeux Olympiques de Munich en 1972 à la vidéotransmission d'un film numérisé entre Paris et Tokyo en 1998 (1ere mondiale de Cybercinéma), en passant par des « Jeux de Communication » (vidéo interactive : interface / homme / machine) entre Tokyo à New York à Cannes en 1983 au travers d'une transmission par satellite, il innove et intègre systématiquement de nouveaux médias.

Polieri avec son projet en 1967 d'une salle gyroscopique en apesanteur  dite satellisée et son projet d'aménagement pour un lieu planétaire en 1968   matérialise son idée parue  et décrite  en 1963 dans  « Scénographie nouvelle », Paris, Architecture d'aujourd'hui : « L'inclinaison, la rotation, les orbites et les mouvements des systèmes planétaires constituent sans doute la structure géométrique même d'une scénographie future ».

Un pont est jeté entre le virtuel et le réel. Les nouvelles technologies, repoussent désormais les limites du spectacle. L'imagination des créateurs forment la seule limite.

Pour autant, ses créations ne procèdent pas d'un souci de modernisation. Sa démarche s'inscrit plutôt comme une ré-écriture des disciplines.

Homme orchestre aux multiples talents, il manipule images et sons dans son spectacle « Sémiographie d'une partition », dirige des danseurs pour ses ballets « Gamme de 7 » et « C 2/49 », ou encore commande des caméras et des micros pour ses « Jeux de communication ».