Le relief visuel et l'image, 1963

La vue ou plus exactement l'œil, et plus précisément encore, l'appareil oculaire est différemment structuré chez l'insecte, l'oiseau et le mammifère. Chez l'homme, l'image d'un même objet réel, est perçu sous un angle légèrement différent par l'œil droit et l'œil  gauche. C'est cette différence de l'angle de vue des deux yeux et la superposition des deux images d'un même objet, enregistrées cérébralement, qui restitue la profondeur du champ de vision et qui produit l'illusion du relief.

De plus, il faudra prendre en compte certaines données culturelles et surtout ne pas confondre le dessin en perspective avec l'image-objet en relief produit principalement par le phénomène physiologique. Les tentatives de représentations graphiques sont en réalité des imitations ou dans tous les cas de faibles équivalences. Elles évoluent avec le temps et l'espace et diffèrent  selon l'époque ou les positions géographiques.

La mise en profondeur de l'image dans la civilisation Egyptienne  par exemple, est basée sur des critères sociaux. L'importance du rang social détermine l'importance de la taille des personnages et par conséquent des plans. Depuis la Renaissance,  en occident, cette taille, pour la perspective, est fonction principalement de l'éloignement des plans et de la figure par rapport au point de fuite à l'infini, qui lui-même s'inscrit généralement sur la ligne d'horizon. Pour la peinture Orientale c'est le code en usage, la plus ou  moins grande intensité de la facture colorée, qui privilégie la place ou la taille des différentes figures et plans...

Le relief photographique et  cinématographique posent des problèmes plus complexes. On est confronté à une double question, celle à propos de la photographie et celle de l'image en mouvement. Le problème du mouvement est relativement simple, depuis l'estimation au XVIIème  siècle de la durée de la persistance lumineuse sur la rétine, estimée à huit secondes par le chevalier d'Arcy, on sait qu'au dessus de dix secondes, les phases successives d'un mouvement se fondent en une impression continue. L'enregistrement et la projection cinématographiques s'effectuent en effet à la vitesse classique conventionnée de 25 images/seconde.

La deuxième question est plus difficile. La matière dont est fabriqué un objectif photographique peut être façonné à loisir et on peut lui faire produire à peu près n'importe quel type d'image. En général les objectifs sont taillés de façon à reproduire des images construites selon le code perspectif ambiant. Il ne reste plus qu'à simuler et imiter les caractéristiques physiologiques qui ont procuré le relief. Il faut donc, pour la restitution,  superposer deux images photographiées avec des angles de vues légèrement décalés et  regarder le résultat à l'aide de lunette spéciale qui rendent les deux yeux indépendant l'un de l'autre. Toutes conditions nécessaires pour la production du relief.